La première approche « classique » entreprise pour aborder le slam et les slameurs a assez rapidement trouver ses limites dans les résistances et les réticences des acteurs de la discipline vis-à-vis d’un regard extérieur. Certes, ils ne refusaient pas de parler devant une caméra, mais, par jeu ou par défi, ils pratiquaient la déstabilisation systématique. Sébastien Jounel a donc décidé de cesser de filmer pour s’essayer au slam pendant plusieurs mois en abandonnant la caméra. Abordés, dans un premier temps, sur la base de leurs différences, il a compris que saisir l’impulsion des poètes et leur implication dans cette activité nécessitait de partager l’expérience en écrivant et en montant sur scène comme eux, avec eux (immersion participante). Il a donc inversé l’approche pour les aborder sur la base de leurs ressemblances.
Les slameurs lui font alors confiance et se livrent parce qu’ils partagent la même expérience. La difficulté en tant que chercheur est de retrouver la distance nécessaire pour poser un regard « objectif » sur la pratique. Sébastien Jounel est finalement arrivé à la conclusion qu’il lui fallait assumer la subjectivité de son regard et que cela ne gâchait finalement en rien l’étude du sujet. Cette prise de conscience tardive a libéré son regard et son approche.