Slam Espace Libre | Phénomène
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Phénomène
du poetry slam

Les individus saisis dans le grand mouvement de globalisation sont désormais interconnectés, modifiant ainsi leur rapport à autrui, à eux-mêmes, au temps et à l’espace. Dans ce contexte, de nouvelles formes culturelles produisent des discours inédits qui portent des dimensions individuelles voire politiques.

 

En suivant quelques-uns de ces slameurs depuis 2005, Sébastien Jounel s’est aperçu que leur pratique ne se limitait pas aux prestations scéniques, qu’elle était multiple, polymorphe et « dynamique ». Dès lors, la question de l’occupation de l’espace public est devenue un des sujets centraux. L’objectif n’était pas de dresser un panel ou un catalogue des différentes formes d’occupation de l’espace public, mais plutôt d’interroger l’interaction entre cet espace public et les artistes qui l’investissent.

« Chacun des artistes que je vais filmer s’emploie à créer un espace insulaire, alternatif au sein de l’espace public pour exprimer leur identité (culturelle, politique, etc.). » (Sébastien Jounel, 26/03/2012)

 

Prise de parole à la marge, le slam vise à une forme d’affirmation identitaire, à la constitution d’un réseau relationnel (une sorte de communauté ouverte) et relève d’une histoire écrite au présent. Autrement dit, les trois paramètres qui définissent un « lieu » selon Marc Augé, opposé aux « non-lieux » dont les villes contemporaines regorgent (espaces de passage, transitoires, anonymes et qui imposent l’anonymat) et à ce que nous pourrions appeler la « ville-musée » (figée dans l’Histoire passée, interdite en quelque sorte au temps présent, à la culture de l’éphémère). Les slameurs réintègrent, à leur façon, la pratique culturelle millénaire de la prise de parole dans un espace public (agora, palabres, scènes antiques).

Les sessions slam constituent un lieu d’expression libre plutôt rare dans l’espace public contemporain. La scène est ouverte à tous, n’importe qui peut venir déclamer un texte, à n’importe quel moment de la soirée, il suffit pour cela de lever la main et le MC (maître de cérémonie) cède le micro pour un temps limité (environ 3 minutes). Du jeune rappeur au vieux poète, de l’ouvrier à l’universitaire, du comédien au spécialiste du calembour, du comique au tragédien, homme, femme, jeune, vieux, révolté, conformiste, naïf, éclairé, handicapé moteur ou mental, ex-détenu, éducateur social…, la pluralité et l’hétérogénéité spécifiques à ces soirées en font un lieu unique de rencontre, de débat, d’échange et de partage où chacun peut librement révéler son intériorité, son engagement, sa condition, pousser un coup de gueule, offrir un coup de cœur, déclarer sa flamme, etc., face à un public qui rend compte de ses sentiments avec une instantanéité que l’on ne retrouve dans aucun spectacle actuel.

 

Au théâtre ou au cinéma, il faut se taire ; dans les sessions Slam, le public réagit immédiatement : il ovationne, crie, hue, interpelle, se moque, fait silence, rit, ce qui confère sans nul doute une dimension cathartique aux sessions. Il y a peu d’endroits aujourd’hui dans lesquels on peut partager, échanger, rencontrer. Les séances de slam apparaissent en ce sens comme l’anti-site de rencontre, l’anti-réseau social virtuel (même si Facebook, entre autres, entre dans la communication des événements ou dans les relations entre poètes). C’est très probablement une relation directe, « physique » que viennent chercher acteurs et spectateurs. C’est aussi un espace de liberté unique, une nouvelle agora créée par le peuple et pour le peuple.

Alain Bouldoires, Sébastien Jounel, Christine Larrazet

Scènes

Marc Kelly Smith, fondateur du dispositif scénique du slam

Enregistré pendant la Coupe de la Ligue de Slam de France 2014

Images : Sébastien Jounel

Attentat verbal

Performance de Maras dans le tramway à Bordeaux

Images : Sébastien Jounel

Coulisses